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Page:Sue - Les Mystères du peuple, tome 4.djvu/96

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prouver logicè que le Seigneur Dieu ferait des miracles en notre faveur… et ta rhétorique nous parle de cet épouseur éternel…

— Ma rhétorique pose les principes… vous allez en voir tout à l’heure les conséquences… ergò, je pose cette autre prémisse, encore nécessaire : que ce Clotaire a commis, entre plusieurs crimes, un forfait devant lequel Clovis lui-même eût peut-être reculé… La chose se passait à Paris, en 533, dans le vieux palais romain[1] habité par les rois franks… Or, écoutez…

— Nous écoutons, docte Symphorien ; il est doux d’entendre les louanges de ses rois.

— Il y a donc environ vingt-cinq ans de cela… Clovis était, depuis longtemps, allé droit au paradis, sur la foi des évêques… après avoir partagé la Gaule entre ses quatre fils : Thierri, Childebert, Clodomir et ce Clotaire, aujourd’hui roi de toutes les provinces conquises… Clodomir étant mort plus tard, laissa trois enfants ; ils furent recueillis par leur grand’mère, la veuve de Clovis, la vieille reine Clotilde ; elle faisait élever près d’elle ses petits-fils, attendant qu’ils fussent en âge d’hériter du royaume de leur père. Un jour qu’elle était venue à Paris, Childebert, qui résidait en cette ville, envoya secrètement un affidé à notre doux Clotaire pour lui dire ceci : « Clotilde, notre mère, garde auprès d’elle les enfants de notre frère, et elle veut qu’ils aient son royaume… viens donc promptement à Paris, afin que nous prenions ensemble conseil sur ce qu’il faut faire d’eux : savoir s’ils auront les cheveux coupés pour être comme le reste du peuple, ou si nous les tuerons, afin de partager entre nous le royaume de leur père, notre frère (A)… »

— Voilà qui commence tendrement.

— C’est la fraternité franque.

— Quel est le Vagre qui méditerait de tuer le fils de son propre frère ?

  1. On voit encore aujourd’hui, rue de la Harpe, les thermes de ce palais parfaitement conservés ; nous engageons nos lecteurs à visiter cette curieuse antiquité.