Page:Sue - Les Mystères du peuple, tome 5.djvu/207

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— La voici, — dit l’intendant en détachant du trousseau une grosse clef de fer. Méroflède prit la clef, la regarda en silence, et resta quelques instants rêveuse.

— Madame, — reprit Ricarik, — je vais faire partir le messager qui attend votre lettre pour l’évêque de Nantes.

— Va, va… porte cette lettre et reviens.

— J’irai aussi jeter un coup d’œil dans l’atelier du vieil orfévre… il doit fondre aujourd’hui le grand vase d’argent.

— Eh ! que m’importe ! je ne songe plus au vase d’argent !

— Moi, j’y songe, madame. Je ne sais pourquoi il m’est venu quelque doute à l’esprit ; il m’a semblé, ce matin, remarquer certain embarras sur les traits de ce rusé vieillard ; il m’a prévenu qu’il s’enfermerait toute la journée ; il complotte peut-être avec ses apprentis de dérober une partie du métal. Il m’a prévenu que la fonte ne commencerait guère qu’à la nuit ; voici la nuit, je veux assister à la fonte, puis je reviendrai, madame. Vous n’avez pas d’autres ordres à me donner ?

Méroflède resta plongée dans ses rêveries, tenant dans sa main la clef du cachot d’Amael ; après quelques moments de silence, et sans lever ses yeux toujours fixés sur le sol, elle dit à l’intendant :

— En sortant d’ici tu diras à Madeleine de m’apporter ma mante et une lampe allumée.

— Votre mante, madame ? Vous voulez donc sortir ? Serait-ce pour aller trouver Berthoald dans son cachot ?…

Méroflède interrompit l’intendant en frappant du pied avec colère, et d’un geste impérieux lui montra la porte.




Bonaïk, ses apprentis, Rosen-Aër et Septimine, enfermés depuis le matin dans l’atelier, avaient impatiemment attendu la nuit ; tout était préparé pour l’évasion d’Amael lorsque le jour tomba : la lueur