Page:Sue - Les Mystères du peuple, tome 5.djvu/305

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filles, leur vue me consolera de tant d’ingratitude ! — Ce disant, l’empereur des Franks mit son cheval au galop afin de se rendre promptement au pavillon de chasse situé à peu de distance. Les seigneurs de la suite de Karl se préparaient à hâter comme lui la marche de leurs montures, lorsqu’il se retourna vers eux en s’écriant d’une voix courroucée : — Que personne ne me suive ! je veux rester seul avec mes filles ; vous attendrez mes ordres en dehors du pavillon.

Un profond et respectueux silence accueillit ces paroles de l’empereur, et tandis qu’il s’éloignait, les seigneurs de sa suite continuèrent lentement leur route vers le rendez-vous de chasse ; Amael, confondu parmi eux, les accompagna, réfléchissant à son entretien avec Karl, et sentant aussi augmenter l’inquiétude que lui causait l’absence prolongée de Vortigern. Les courtisans de l’empereur, frissonnant de froid sous leurs habits de soie emplumés et dépenaillés, maugréaient tout bas contre le caprice de leur souverain, qui retardait ainsi le moment où ils espéraient se réchauffer au foyer du pavillon et se réconforter en soupant ; descendus de leurs chevaux, ils causaient depuis un quart d’heure, lorsque Amael, qui, ayant aussi mis pied à terre, se tenait pensif, adossé à un arbre, vit venir Octave qui, courant à lui, s’écria d’une voix émue et précipitée : — Amael, je vous cherchais ; venez vite. — Le vieux Breton attacha son cheval à un arbre, suivit Octave, et lorsque tous deux furent éloignés de quelques pas du groupe des seigneurs franks, le jeune Romain reprit : — Je suis dans une inquiétude mortelle au sujet de Vortigern.

— Que dis-tu ?

— Voici ce que je viens d’apprendre dans ce pavillon : votre petit-fils ayant sans doute été emporté par son cheval, au commencement de la chasse, Thédralde et Hildrude, deux des filles de l’empereur, l’ont suivi. Que s’est-il passé ? je l’ignore ; seulement l’on m’assure qu’Hildrude, qui semblait fort irritée, est retournée à Aix-la-Chapelle avec deux de ses sœurs et les concubines de son père… donc Thé-