Page:Sue - Les Mystères du peuple, tome 7.djvu/344

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L’abbé Reynier se levant. — Hérétiques de Lavaur, voulez-vous abjurer votre…

Aimery, l’interrompant. — Assez, moine ! assez ! Entre ton Église et la potence, nous choisissons, pardieu, et de grand cœur, la potence… Elle nous semble une aimable et accorte fille, comparée à ta vieille prostituée de Rome, qui croit se rajeunir et se faire adorer en prenant des bains de sang ! Ma sœur et son fils sont morts ! je ne tiens plus à la vie !

L’abbé Reynier, d’une voix tonnante. — À la potence les hérétiques !

Les bourreaux se précipitent sur Aimery et s’apprêtent à le pendre.

Mylio, jetant autour de lui un regard navré. — Pauvre Florette ! elle aura succombé à la torture !… Ma dernière pensée sera pour mon frère et pour toi, douce enfant ! J’ai, selon tes désirs, suspendu à mon cou ton petit fuseau… il est là sur mon cœur. (S’adressant à Peau-d’Oie, qui paraît très-pensif.) Mon vieil ami, pardonne-moi ta mort ; c’est ton dévouement pour moi qui t’a conduit ici… Quoi ! tu ne me réponds rien ?

Peau-d’oie, gravement. — Je me demandais s’il y a du vin et des jambons dans ces autres mondes étoilés dont nous parlait ton frère, et où, selon lui, nous allons renaître en esprit, en chair et en os ? Corbœuf ! si nous ressuscitons aussi en bedaine… la mienne me gênera furieusement lors de mon ascension vers l’empyrée !

Les bourreaux, au moyen d’une échelle appliquée à la potence, ont hissé Aimery jusqu’à la corde, terminée par un nœud coulant ; il y passe la tête et s’écrie : — Honte et exécration à l’Église catholique ! — Les aides du bourreau enlèvent brusquement l’échelle, le supplicié demeure pendu, ses membres s’agitent convulsivement pendant quelques instants ; puis ils se raidissent et demeurent immobiles..

Le bourreau, s’approchant de Peau-d’Oie. — À ton tour, mon gros compère…