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Page:Sue - Les Mystères du peuple, tome 8.djvu/116

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— Tout instrument qui m’aide à faire le bien, je l’emploie.

— Et ensuite, tu le brises ?

— Oui, si cela est nécessaire ; mais Robert-le-Coq est trop souple pour qu’on le brise. Pourtant, malgré sa finesse, j’ai deviné son but secret.

— Et ce but ?

— Le peuple de Paris, dans son bon sens, a surnommé l’évêque de Laon une bisaguë à deux tranchants ; et le peuple, sire, a raison.

— Explique-toi.

— En se montrant si hostile au roi Jean, votre beau-père, et plus tard si hostile au régent, votre beau-frère, l’évêque de Laon jouait un double jeu : il voulait, à l’aide du parti populaire, d’abord détrôner la dynastie régnante…

— Et puis ?

— Et puis… vous donner la couronne. Voilà pourquoi, sire, je ne m’étonne point lorsque vous me dites : « Je veux être roi des Français. »

— Et de ma prétention que penses-tu ?

— Vous avez quelques chances de monter sur le trône.

— Avec ton concours ?

— Peut-être.

— Il serait vrai ! — s’écria le roi de Navarre pouvant à peine dissimuler sa joie. Puis, réfléchissant et jetant sur le prévôt des marchands un regard défiant, il garda un moment le silence et reprit : — Marcel, tu me tends un piége… Je sais comment, et plus d’une fois, tu t’es exprimé sur mon compte.

— Sire, on vous appelle Charles-le-Mauvais, et je vous tiens pour bien nommé ; mais vous êtes actif, subtil, aventureux ; vous commandez à de nombreuses bandes armées ; vos partisans sont puissants, vos richesses considérables ; vous êtes, en un mot, une force qui, le moment venu, peut être utile. Aussi vous ai-je fait