fut sublime de courage moral, de dignité, d’abnégation, dans ses luttes opiniâtres contre l’ignoble couardise de Charles VII et contre la jalousie féroce de ses généraux ou de ses courtisans. Plus d’une fois nos yeux se sont mouillés de larmes en songeant à ce que cette âme virginale et tendre, loyale et naïve, dut souffrir dans ses rapports avec ce prince égoïste et ces hommes indignement corrompus ! Vous partagerez, nous l’espérons, notre émotion, chers lecteurs ; et sans anticiper sur ce récit navrant, où notre héroïne se montre sous un jour tout nouveau, nous voulons cependant, texte en main, prouver ceci :
« Toutes les importantes opérations militaires de Jeanne Darc, auxquelles la France dut son salut, ont été ouvertement ou sournoisement, traîtreusement entravées, soit par les conseillers du roi, soit par le roi lui-même, soit par les généraux obligés d’apporter le concours de leurs soldats à la guerrière. Leur haine, leur envie implacables l’ont poursuivie jusqu’à sa mort ; leur trahison infâme l’a fait tomber aux mains des Anglais, et ceux-ci ont livré l’héroïne au tribunal ecclésiastique composé de prêtres français qui l’ont condamnée au bûcher. »
La ligue de ces courtisans, de ces capitaines, de ces prêtres, contre une pauvre fille dont le seul crime était de les primer tous, par le génie, par le cœur, et surtout par son amour pour le pays… cette lâche et odieuse ligue vous semble impossible, chers lecteurs ? Et pourtant, vous verrez se dérouler, se dénouer cette abominable trame ; mais, quant à présent, bornons-nous à quelques preuves à l’appui de notre affirmation :
Jeanne Darc arrive à Orléans le samedi soir 30 avril 1429 ; elle sent la nécessité d’une attaque prompte, décisive, et, après être allée examiner les retranchements ennemis, avoir mûri son plan de bataille, elle convoque les capitaines.
« La Pucelle requit les chefs de guerre que le jour de l’Ascension ils allassent avec elle attaquer la redoute de Saint-Laurent, où se trouvaient les plus considérables des chefs anglais, disant que l’heure était venue et qu’on la prendrait. Mais les chefs ne voulurent pas guerroyer en cette journée par révérence pour l’Ascension. L’on convint que le lendemain on attaquerait les retranchements du côté de la Sologne et du pont, afin de pouvoir avitailler la ville par le Berry. Ce délai, cette journée perdue, causèrent une grande déplaisance à la Pucelle, qui s’en tint mécontente des capitaines et des chefs de guerre. » (Vol. IV, p. 225.)
Quelques jours après, malgré le mauvais vouloir des capitaines, Jeanne Darc, par des prodiges de valeur et d’intelligence de la guerre, avait enlevé presque toutes les positions des Anglais. Quoique grièvement blessée deux fois, elle veut achever son œuvre et, le len-