driers, il vous servira de bélier, la porte cédera, nous aurons ces Anglais, fussent-ils cachés dans les nues[1] !
Les soldats, ranimés par ces paroles, obéissent à la Pucelle ; maître Jean, malgré sa blessure, dirige la manœuvre. On dégage des décombres une poutre énorme, vingt hommes la soulèvent ; ils l’emploient en guise de bélier pour enfoncer la porte de l’église. Soudain des soldats qui, du haut du parapet de la redoute, dominaient au loin la plaine, s’écrient :
— Nous sommes perdus ! l’ennemi sort en grand nombre de la bastille de Saint-Pouaire !
— Il va nous prendre à revers !
— Nous allons nous trouver entre ces troupes fraîches et les Anglais retranchés dans l’Église !
Ce mouvement, habilement prévu par Jeanne, qui avait donné les ordres nécessaires pour le neutraliser, s’opérait en effet.
— Ne craignez rien ! — dit la guerrière à ceux qui l’entouraient, atterrés de cette nouvelle ; — une troupe de réserve va sortir de la ville et couper le chemin aux Anglais. Ne regardez pas derrière vous, mais devant vous !… Hardi ! enlevons l’église !…
À peine Jeanne achevait-elle ces paroles, que les tintements précipités du beffroi de la cité se font entendre. Bientôt un corps de cavalerie, suivi de près par une des compagnies d’infanterie, débouchant d’Orléans à grands pas et en bon ordre, se met en bataille sur le chemin de la Sologne, tracé entre la bastille de Saint-Loup et celle de Saint-Pouaire, dont la garnison venait d’effectuer une sortie ; mais ces Anglais, intimidés par l’attitude résolue du corps de réserve, commandé par le maréchal de Saint-Sever, s’arrêtent, puis rentrent dans leurs retranchements. Les soldats de Jeanne, voyant ainsi ses paroles réalisées, croient à sa prescience divine ; désormais certains de n’être pas attaqués à revers, enflammés par leur premier succès,
- ↑ Procès de cond., t. I, p. 49.