Page:Sue - Les misères des enfants trouvés II (1850).djvu/327

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dres détails étaient toujours restés présents à ma pensée… En effet, le petit vicomte Scipion était accompagné, ce jour-là, d’un autre enfant nommé Robert, de quelques années plus âgé que lui, d’une charmante figure, et qui, par ses soins empressés auprès de Régina, m’avait inspiré une sorte de jalousie.

Sans doute ce Robert… était l’ami d’enfance de Régina… le rival dont parlait l’inconnu… Quant à l’autre rival, l’homme mûr, le vilain décrassé… je ne pouvais savoir de qui il s’agissait.

Voulant tâcher d’obtenir des renseignements plus complets, je dis à l’inconnu :

— Vous vous méprenez, Monsieur, sur mes intentions… je…

— Ah !… ah !… vous vouliez me faire parler… mon galant homme à bonnet grec… — reprit l’inconnu en m’interrompant… — je ne suis pas si gris… que j’en ai l’air… voyez-vous…

— Je vous parlais de mademoiselle Régina de Noirlieu, — lui dis-je, — parce que sa famille… a habité mon pays…

— Régina ? — dit l’inconnu en jouant l’étonnement… — je n’ai pas… l’honneur… de connaître… cette demoiselle.

— Vous allez pourtant fréquemment chez son père… vous savez ? le baron de Noirlieu ?… rue de…

Et j’espérais que l’inconnu achèverait l’indication de l’adresse.

Mais il reprit :

— Puisque… je ne connais pas cette demoiselle… je ne peux pas… aller chez elle… Ah !… vous croyez… me faire jaser…

— C’est vous qui, le premier, Monsieur, m’avez parlé de mademoiselle Régina.

— Puisque je ne la… connais pas… je ne peux pas vous… parler d’elle… — reprit-il.

Et l’inconnu, s’obstinant avec une ténacité d’ivrogne à ne pas se départir de ces réponses malgré toutes les questions que je lui adressai sur Régina, il me fut impossible d’obtenir d’autres renseignements.

En devisant ainsi, nous avions marché le long du boulevard, et