Page:Sue - Les mystères de Paris, 4è série, 1842.djvu/5

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Morel alla prendre la cruche sous le toit. Après avoir difficilement brisé la glace qui recouvrait l’eau, il remplit une tasse de ce liquide gelé et s’approcha du grabat de sa femme qui étendait vers lui ses mains impatientes.

Mais, après un moment de réflexion, il lui dit :

— Non, ça serait trop froid… dans un accès de fièvre… ça te ferait du mal…

— Ça me fera du mal ? tant mieux, donne vite alors… — reprit Madeleine avec amertume — ça sera plus tôt fini… ça te débarrassera de moi… tu n’auras plus qu’à être gardien de fou et d’enfants. — La malade sera de moins.

— Pourquoi me parler comme cela, Madeleine ? je ne le mérite pas… — dit tristement Morel. — Tiens, ne me fais pas de chagrin, c’est tout juste s’il me reste assez de raison et de force pour travailler… je n’ai pas la tête bien solide… elle n’y résisterait pas… et alors qu’est-ce que vous deviendriez tous ? c’est pour vous que je parle… s’il ne s’agissait que de moi, je ne m’embarrasserais guère de demain…