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Page:Sue - Les mystères de Paris, 5è série, 1843.djvu/116

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prisonnières jetèrent un cri d’effroi… Seule, la Goualeuse, regardant sans crainte cette redoutable créature, lui sourit avec amertume, en lui disant de sa voix angélique : « Oh ! tuez-moi, tuez-moi, je le veux bien… et ne me faites pas trop souffrir ! » Ces mots, m’a-t-on rapporté, furent prononcés avec une simplicité si navrante, que presque toutes les détenues en eurent les larmes aux yeux.

— Je le crois bien — dit madame d’Harville, péniblement émue.

— Les plus mauvais caractères — reprit l’inspectrice — ont heureusement quelquefois de bons revirements. En entendant ces mots empreints d’une résignation déchirante, la Louve, remuée, a-t-elle dit plus tard, jusqu’au fond de l’âme, jeta son couteau par terre, le foula aux pieds et s’écria : « J’ai eu tort de te menacer, la Goualeuse, car je suis plus forte que toi ; tu n’as pas eu peur de mon couteau, tu es brave… J’aime les braves ; aussi maintenant, si l’on voulait te faire du mal, c’est moi qui te défendrais… »

— Quel caractère singulier !

— L’exemple de la Louve augmenta encore