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Page:Sue - Les mystères de Paris, 5è série, 1843.djvu/41

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avec l’aveugle confiance de la jeunesse ; époux, il m’a frappé dans ma femme ; fils, il m’a frappé dans mon père ; père, il m’a frappé dans mon enfant…

— Je croyais, monseigneur, que la grande-duchesse ne vous avait pas laissé d’enfant ?

— En effet ; mais avant mon mariage j’avais une fille, morte toute petite… Eh bien ! si étrange que cela vous paraisse, la perte de cette enfant, que j’ai vue à peine, est le regret de toute ma vie… Plus je vieillis, plus ce chagrin devient profond ! Chaque année en redouble l’amertume ; on dirait qu’il grandit en raison de l’âge que devrait avoir ma fille… Maintenant elle aurait dix-sept ans !…

— Et sa mère, monseigneur, vit-elle encore ? — demanda Clémence après un moment d’hésitation.

— Oh ! ne m’en parlez pas !… — s’écria Rodolphe, dont les traits se rembrunirent à la pensée de Sarah. — Sa mère est une indigne créature, une âme bronzée par l’égoïsme et par l’ambition. Quelquefois je me demande s’il ne vaut pas mieux pour ma fille d’être morte que d’être restée aux mains de sa mère…