Page:Sue - Martin l'enfant trouvé, vol. 5-6.djvu/42

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— Oui… cela me surprend…

― Je vais sur le port en amateur… depuis deux jours je cherche un commis… je n’avais rien trouvé à mon idée… mais, ce matin, je t’ai rencontré… je suis sûr que tu ferais mon affaire, voyons, bois donc…

— Non…

― Tête de fer, va… Enfin, c’est égal, arrangeons-nous, vivons ensemble, tu n’en seras pas fâché…

— Vous ne voulez pas me dire où est Bamboche ?

— Pas si bête… il te garderait.

― Merci du pain que vous m’avez donné… ― dis-je à cet homme en me levant, ― si je puis un jour… je vous le rendrai…

— Tu t’en vas ?

— Oui…

— Voyons, écoute donc… que diable…

— C’est inutile…

— Où coucheras-tu cette nuit ?

― J’espère ce soir gagner quelques sous à la sortie des spectacles.

― Oh !… oh !… ― dit le cul-de-jatte en paraissant réfléchir à ce que je venais de lui dire, ― tu connais déjà les bons endroits… Allons… tu me refuses… ça m’est égal… tôt ou tard je te repincerai… Oui, c’est moi qui te le dis : je t’attends.

Malgré moi je ne pus m’empêcher de tressaillir en entendant avec quel accent profondément convaincu le misérable prononça ces mots :

Je t’attends

Je me hâtai de le quitter, et il me cria :

— Au revoir !