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CHAPITRE XIII.


journal de martin (Suite).


Je le confesse, au mépris que m’avait d’abord inspiré la bassesse des goûts de M. de Montbar, succéda un redoublement de commisération ; je n’excusai pas cette bizarre dépravation ; mais, ainsi qu’il le disait, je la compris ; je compris même, si hideuse qu’elle fût, l’espèce de poésie particulière à de pareils contrastes ; je sentis l’attrait que ces alternatives devaient offrir à un homme dès long-temps blasé, quoique jeune, sur les distractions creuses, monotones d’une opulente oisiveté.

Je me félicitai doublement alors d’avoir pu me ménager cet entretien avec le prince, j’augurai mieux de son avenir, car cette dépravation passée, dont il semblait rougir, n’annonçait pas, ainsi qu’il le disait énergiquement lui-même, le goût de la crapule pour la crapule… Au moins dans ces accès de dégradation, il y avait un profond sentiment de comparaison, sentiment jusqu’alors faussé, vicié, mais qui, cependant, contenait le germe d’une pensée qui, dans son application, pouvait être généreuse et féconde.