Page:Sue - Martin l'enfant trouvé, vol. 7-8.djvu/204

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oriental cachait sous ses haillons un diamant qui eût payé la rançon d’un roi.

— C’est encore vrai, — s’écria le prince, dont l’étonnement allait croissant, mais dont l’irritation amère semblait diminuer à chaque instant, — Comment avez-vous ainsi presque deviné mes impressions ? Encore une fois, Monsieur, je vous le demande, non plus avec menaces… mais presque comme une prière ? Quel intérêt singulier vous amène auprès de moi ? Enfin, qui êtes-vous ?

— Mon nom… vous ne le saurez jamais… Monsieur.

— Jamais ?

— Quoi que vous fassiez…

— C’est ce que nous verrons, — s’écria le prince.

— Vous le verrez… Monsieur… Quant au motif qui m’amène auprès de vous, j’oserais presque dire que, tout-à-l’heure… j’étais un juge…

— Un juge !

— Mais maintenant, croyez-moi, Monsieur, — ajoutai-je d’une voix pénétrée, — c’est un ami… permettez-moi ce mot… un ami sincère qui vous parle… et bientôt des faits vous prouveront que je dis vrai.

— Un juge ?… un ami ? — reprit le prince, — mais continuez, Monsieur, continuez. Ce qui m’arrive est si étrange… je sens que malgré moi votre parole me domine, m’impose tellement que je ne peux plus m’étonner de rien… même d’avoir dans ce bal immonde trouvé en vous d’abord un grossier ivrogne, puis un homme du monde, aux manières parfaites, qui m’a défendu avec autant de courage que de générosité… puis un juge…