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Page:Sue - Martin l'enfant trouvé, vol. 7-8.djvu/286

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troublé par de mensongères visions, et que je me rappelle réellement la physionomie de l’attitude de Madame de Montbar… je puis à peine comprendre la funeste aberration où je suis tombé, car je me disais :

» — Pauvre femme..... j’ai tant fait pour elle qu’elle s’est enfin rendue… Elle n’attend qu’un mot de moi pour me faire un aveu, qui à la fois la charme et la tourmente, car cette pâleur, cet abattement, des émotions trop contenues les causent ; elle détourne ses yeux de moi… de crainte peut-être de céder à l’attraction magnétique de mon regard ; son trouble, sa distraction me disent assez qu’elle lutte une dernière fois, mais en vain, contre les pensées d’amour qui l’assiègent de toute part ; mais la nuit vient… le silence est profond ; nous sommes seuls… seuls… dans le lieu qui lui rappelle tant de souvenirs… Jamais occasion plus opportune ne se présentera pour commencer sur ses lèvres l’aveu qu’elle retient encore…

» Je me suis donc agenouillé aux pieds de ma femme, j’ai pris une de ses mains qu’elle m’a abandonnée sans résistance.

» Cette main brûlante, amaigrie, je l’ai couverte de baisers passionnés… et elle a répondu par une pression convulsive à mon étreinte…

» — Régina ! — me suis-je écrié avec ivresse, — enfin… tu es revenu à moi… tu es ma Régina d’autrefois… tu m’aimes ?…

» — Oh ! oui… Quoi qu’on fasse… je t’aime toujours, je t’aime plus ardemment que jamais… J’en meurs… de cet amour… mais je ne le dis pas… je ne puis pas le dire… je lui dois tantà lui ! C’est