Aller au contenu

Page:Sue - Martin l'enfant trouvé, vol. 7-8.djvu/31

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

J’éprouvais une angoisse singulière en attendant la réponse de Juliette, qui dit tout-à-coup :

— Tiens, où est donc le père Louis ?

C’était le vieux valet de chambre du prince ; tous les yeux se tournèrent vers la place que cet ancien serviteur avait occupée ; il avait discrètement disparu, sans que l’on eût remarqué son départ.

— Il aura filé, bien sûr, — reprit Juliette, — quand il a vu la soirée tourner aux cancans ; il les déteste… Après tout, tant mieux, il est gênant, et puis on n’en peut rien tirer de lui… sur notre maître.

Je fus en effet frappé de la discrétion de ce domestique, le seul qui fût sans doute dans le secret des excursions nocturnes du prince de Montbar ; je me demandai par quel prodige d’adresse il avait pu cacher jusqu’alors aux autres domestiques de la maison les absences de son maître qui, je l’ai su depuis, se renouvelaient assez fréquemment.

— Vous avez raison, Juliette, — reprit la femme de chambre de Mme Wilson, — le vieux Louis nous aurait gênées… Eh bien ! je vous disais ; et ici, depuis que la princesse court les bals et les fêtes avec ma maîtresse…

— Voilà tout ? rien de nouveau ? — dit Astarté.

— Ma foi non ; Madame reçoit le matin la fleur des pois des élégants, comme dit Leporello ; elle fait toujours de superbes toilettes ; on lui envoie des bouquets sans nom, comme ce soir, et elle porte de préférence celui de sa fleuriste. Je n’en sais ni plus ni moins. Après cela, si les femmes de chambre, pour bien des raisons… savent souvent la fin des choses, elles en ignorent les com-