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ses gredins d’électeurs limousins ont fait une telle procession avec leurs souliers crottés, qu’ils nous ont perdu l’escalier ; c’était une boue comme dans la rue.

La gaîté causée par le récit de Leporello fut interrompue par l’arrivée de Mme  Gabrielle, femme de charge du comte Duriveau.

La venue de cette femme excita au plus haut degré mon inquiétude et mon attention. Ses moindres paroles, sa physionomie, furent pour moi l’objet d’un examen pénétrant.

— Ah ! bonsoir, ma chère ; comme vous venez tard ! — lui dit Juliette. — Les gâteaux sont tout froids, et le thé aussi.

— Je suis encore bien heureuse d’avoir pu venir, allez !! — répondit cette femme assez âgée, grande, forte, à la figure virile, — je n’y comptais plus… Monsieur est un si fameux tyran !  !

— C’est ce que je disais à ces dames, — reprit Juliette, — mais par quel heureux hasard avez-vous pu vous échapper ?

— Hasard est le mot, un vrai hasard : Figurez-vous que, depuis quelques jours, — reprit la femme de charge du comte Duriveau, — Monsieur était d’une humeur de dogue, à-peu-près comme à son ordinaire ; il a par là-dessus la manie, vous le savez, de ne pas vouloir souffrir qu’on mette le pied hors de l’hôtel sans lui en demander la permission, toujours pour la chose d’exercer sa tyrannie…

— Quel homme !… quel homme ! — dit Astarté.

— Quant à ça, Juliette, — dit la femme de charge du comte Duriveau, — votre maîtresse peut brûler une fière