Page:Sue - Martin l'enfant trouvé, vol. 7-8.djvu/91

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profondément fouillées de la bordure du grand miroir de Venise, dont le couronnement, au lieu d’être appuyé au long de la muraille, s’inclinait en avant.

Soudain cette glace, sombre jusqu’alors, car elle ne réfléchissait qu’une porte de bois sculptée, placée à l’extrémité de la galerie, porte de la chambre à coucher de la princesse, soudain cette glace s’est éclairée… Voici le tableau qui s’y est reflété devant moi, pendant une seconde à peine…

Ma maîtresse… ses magnifiques cheveux encore un peu en désordre, les épaules et les bras nus… son sein de neige à peine caché par la batiste garnie de dentelles, que deux petits boutons d’émeraude ne fermaient plus… ma maîtresse, assise au coin de sa cheminée sur une petite chaise de tapisserie bleue, se courbant à demi, tirait sur sa jambe fine et ronde un bas de soie d’un gris de perle, et l’attachait au-dessus de son genou avec une jarretière de satin cramoisi à fermoir d’or, tandis que sa jambe droite, encore nue, polie comme de l’ivoire, luttait de blancheur avec le tapis d’hermine où s’appuyait son petit pied aux veines bleuâtres et aux doigts roses.

J’entendis le bruit d’une porte qui se fermait ; aussitôt, la glace devint sombre, l’étincelante et voluptueuse vision avait disparu.

. . . . . . . . . . . . . . . . . . . .

Je me croyais sous l’obsession d’un rêve ; un léger coup frappé familièrement sur mon épaule me fit tressaillir. Je me retournai ; c’était Mlle Juliette.

— J’espère, mon cher Martin, — m’a-t-elle dit en riant, — que vous êtes joliment attentionné à ce que vous