Page:Sue - Martin l'enfant trouvé.djvu/470

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ment-là, vois-tu, je t’aurais étranglé ; mais après, quand je t’ai vu sans chercher à te défendre, pleurer, non des coups que je te donnais… mais de ce que je ne voulais pas être ami avec toi, dam… ça m’a fait un effet tout drôle… tout tendre ;… je me suis senti le cœur gros comme je ne l’avais pas eu depuis la mort de mon père… et je ne sais pas comment m’est venue tout de suite l’envie de te parler de lui, et de te raconter mon histoire… que je n’avais dit à personne… aussi maintenant, si tu veux être ami avec moi…

Et comme, dans un mouvement de joie indicible, j’allais me jeter au cou de Bamboche, il arrêta mon transport, et me dit :

— Un instant, si nous sommes amis… je serai le maître.

— Tu seras le maître…

— Tu feras ce que voudrai.

— Tout ce que tu voudras…

— Si on me fait du mal… tu me revancheras…

— Sois tranquille, j’ai du cœur.

— Tu me diras tout ce que diront la Levrasse et la mère Major.

— Tout.

— Tu ne me cacheras rien de ce que tu penses.

— Rien… ni toi non plus.

— Ce que je veux que tu fasses pour moi, je le ferai pour toi, — s’écria vivement Bamboche, — sauf que je tiens à être le maître, parce que c’est mon genre ; je te dirai tout, tu me diras tout, je te revancherai comme tu me revancheras… et nous comploterons toujours ensemble. Ça va-t-il ?