Page:Sue - Mathilde, tome 2.djvu/109

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que je fermai à demi les yeux, je ne pus faire un pas ; malgré moi ma tête appesantie s’appuya sur l’épaule de Gontran, et je joignis mes deux mains sur son bras…

Gontran, sans doute aussi ému que moi, s’arrêta, et ne troubla pas cet accablement ineffable.

— Pardon, — lui dis-je, après quelques minutes de silence ; — je suis bien faible et bien enfant, n’est-ce pas ? Mais que voulez-vous ? tant de bonheur est au-dessus de mes forces… Oh ! que vous devez être heureux d’inspirer autant d’amour !…

— Vous avez raison, Mathilde, car l’inspirer, c’est le ressentir ! C’est à moi de vous demander pardon de mon silence… et pourtant non… car c’est aussi un langage que le silence… il exprime tant de choses que la parole est impuissante à rendre !… Dites, Mathilde, quels mots pourraient peindre ce que nous éprouvons ?

— Oh ! cela est vrai ; il me semble aussi que la parole doit se taire lorsque la pensée s’entretient avec l’âme… Mais, mon Dieu ! — ajoutai-je en souriant, — vous allez trouver