Page:Sue - Mathilde, tome 2.djvu/172

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— Il m’importe de ne pas m’aliéner un ami… un ami intime que j’aime, auquel je suis sincèrement attaché… Vous m’entendez, Madame ?

— Vous aimez cet homme, dites-vous, Gontran ?… Je voudrais vous croire, et je ne puis… Il n’y a aucun rapport entre la noblesse de vos sentiments et la grossièreté de M. Lugarto… Et puis, enfin, je ne sais… mais, quand vous parlez de l’amitié que vous ressentez pour lui… vos traits se contractent… votre parole est amère… et l’on dirait qu’il s’agit d’un sentiment tout contraire.

Ces mots, que je dis presque au hasard, semblèrent produire un effet terrible sur M. de Lancry. Il frappa du pied avec violence ; il s’écria, les lèvres tremblantes de colère :

— Qu’entendez-vous par là, Madame ? qu’entendez-vous par là ?

Effrayée, le cœur me manqua ; je fondis en larmes, et je dis à Gontran :

— Pardon, mon ami, pardon, je n’ai rien voulu vous dire de blessant, seulement je ne puis comprendre…