Page:Sue - Mathilde, tome 2.djvu/188

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approchons des rois d’Aragon. Ah bien ! oui ; mais voilà une toute petite chose qui m’arrête dans mon ascension vers le passé.

— Eh ! mon Dieu, Madame ! ne vous en occupez pas ; je vous rends grâce de toute votre sollicitude, — s’écria M. Lugarto.

Mademoiselle de Maran ne fit pas semblant de l’avoir entendu, et reprit :

— Oui, il n’y a que cette petite difficulté-là, c’est qu’on dit que monsieur votre grand-père était quelque chose comme un esclave nègre, ou approchant.

— Madame… vous abusez…

— C’est là ce qui fait, — reprit mademoiselle de Maran, sans abandonner son tricot, — c’est là ce qui fait que je ne peux pas venir à bout de me figurer monsieur votre grand-père avec une couronne de comte sur la tête. Coiffé de la sorte, il ressemblerait comme deux gouttes d’eau à ces vilains sauvages de Bougainville qui portaient gravement une croix de Saint-Louis passée dans le bout de leur nez. Est-ce que vous ne trouvez pas ?

Je frémis de l’expression presque féroce que prit un moment la physionomie de M. Lugarto ;