Page:Sue - Mathilde, tome 2.djvu/233

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triomphe serait bien moins grand, la jalousie vous ferait perdre une grande partie de votre supériorité sur moi. Mais voyez donc un peu ma prétention, ma vanité ! j’ose entrer en lutte avec vous, avec vous armée de tant d’avantages ! avouez que c’est bien héroïque !

J’étais au supplice ; il me fallut l’habitude de dissimuler mes chagrins, habitude que j’avais contractée pendant ma triste enfance, pour m’empêcher de pleurer à chaudes larmes.

Hélas ! je n’aurais pas cru devoir sitôt recourir à cette faculté, fruit d’un si misérable passé. Toutes les forces de mon âme furent employées à cette contrainte. Je sentis que j’allais encore faire une sotte réponse ; et presque malgré moi je balbutiai ces mots absurdes :

— Parlez-vous sérieusement, Madame ?

La princesse recommença de rire aux éclats.

— Comment, si je parle sérieusement ! — reprit-elle ; — vous me faites là une question de pensionnaire. Mais certainement, tout ce que je vous dis est très sérieux. Je raffole de M. de Lancry ; et vous voyez en moi une rivale déclarée, prête à vous disputer ce cœur par tous les moyens possibles. Quelle belle occa-