Page:Sue - Mathilde, tome 2.djvu/234

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sion, enlever une charmante conquête à une adversaire redoutable !

Je regardai fixement madame Ksernika pour tâcher de pénétrer le fond de sa pensée. Cela me fut impossible, tant l’expression de ses traits était mobile et changeante.

Peu à peu pourtant je repris mon sang froid, je surmontai mon émotion, je tâchai de reprendre un air riant et léger.

— Mais, Madame, — répondis-je, — savez-vous que vous risquez beaucoup en entrant en lice contre moi ?

— Certainement, et c’est ce qui fait mon orgueil ; car enfin vous êtes bien plus belle, bien plus jeune, bien plus aimable que moi, — dit la princesse avec un accent moqueur.

— Ceci n’est pas la question, Madame ; ce qui fait ma supériorité, c’est que je n’ai pas, comme vous… une réputation à conserver…

— Comment cela, Madame ? — dit la princesse en me regardant avec surprise ; — votre réputation…

— Oh ! Madame, j’ai la mienne comme vous avez la vôtre… Il y en a de toutes les sortes.