Page:Sue - Mathilde, tome 2.djvu/255

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que riche, notre fortune ne nous permet pas de satisfaire à tous vos caprices.

— Des caprices ! J’en ai bien peu, Gontran, et celui-là était saint et sacré pour moi.

— Encore une fois, ce qui est fait est fait ; il est impossible de revenir sur cette vente : ce sont, mon Dieu ! d’ailleurs des imaginations de roman ; s’il fallait acheter tous les endroits où l’on s’est trouvé heureux, on se verrait au bout d’un certain temps singulièrement embarrassé de ces propriétés commémoratives qui ne vous rapporteraient que des souvenirs. Malheureusement, dans notre siècle de fer, il faut pour vivre d’autres revenus que ceux-là.

Cette plaisanterie de Gontran me fit un mal affreux. J’avais toujours cru à sa religion pour ces temps si fortunés, je ne pus m’empêcher de lui répondre en pleurant :

— Hélas !… mon ami, cette occasion de folle dépense, comme vous dites, était unique !

— C’est-à-dire que, depuis ce temps, vous vous trouvez très malheureuse sans doute ?

— Non… non…je ne me plains pas ; seulement je regrette ces beaux jours où vous étiez tout à moi… où nous vivions l’un pour l’autre.