Page:Sue - Mathilde, tome 3.djvu/59

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mière fois ; de ce jour il était à moi. Je lui prêtai mille louis si facilement, il savait ma fortune si énorme, qu’il accepta sans scrupule, et qu’il revint à la charge. J’allai au devant de ses désirs par un nouveau prêt plus considérable. La tête lui tourna, il me prit pour une vache à lait.

Dans son intérêt, je lui conseillai charitablement d’étaler de nouveau un grand luxe. On l’avait cru ruiné, on le verrait splendide ; il annoncerait un héritage tout frais, et ne pourrait cette fois manquer d’accrocher quelque riche mariage. Quant à la dépense, j’étais là, j’avais trois ou quatre millions de revenus ; une fois richement marié, il me rembourserait. C’était une sorte d’entreprise pour laquelle je lui prêtais des fonds ; je ne les lui réclamerais qu’après la réalisation des bénéfices. J’ai l’air d’un sot, n’est-ce pas ? car, après tout, Lancry pouvait ne pas trouver à se marier, et je pouvais en être, moi, pour mon argent, quoiqu’il m’eût fait plus tard des obligations que j’ai là… Mais, pour la réussite de certain projet assez adroitement combiné, il me fallait lui inspirer une confiance aveu-