Page:Sue - Mathilde, tome 6.djvu/117

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daignant profondément l’amant qu’elles m’envient, et en les défiant de porter atteinte à une fidélité dont je me raille. — Comme les conquérants usurpateurs, je me suis faite toute seule ce que je suis ; — d’un nom presque ridicule, j’ai fait un symbole d’élégance et de distinction ; on copie mes toilettes, on cite mes reparties, on envié mes succès ; mes préférences mettent un homme à la mode, mes moqueries le noient à jamais. — Quand j’arrive dans un bal, toutes les femmes prennent aussitôt d’une main rude leurs adorateurs en laisse, et je ne vois que regards de haine et de jalousie ; je n’entends que chuchotements aigres ou reproches courroucés… — Mais qu’une fleur de mon bouquet tombe à mes pieds, tous les adorateurs rompent leurs cordes et se précipitent pour la ramasser… à la plus grande mortification d’une infinité de belles dames, qui rappellent en vain ces ingrats effarés. — Tout cela est charmant… Pourtant il me manque quelque chose… ou plutôt tout me manque. Je n’aime pas, je n’ai jamais aimé… Oh ! que je voudrais aimer !…