Page:Sue - Mathilde, tome 6.djvu/253

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résignation et de vertu…je vous ai épousée… sans amour… Il s’agit à cette heure de parler avec franchise.

— Il y a long-temps, Monsieur, que vous ne dissimulez plus… Mais à quoi bon ?…

— Vous allez le savoir… — me dit-il en m’interrompant. — Je vous ai donc épousée sans amour ; vous étiez une riche héritière, j’ai joué mon rôle en vous débitant le phébus qu’on débite en pareil cas. Vous m’avez cru, parce qu’il vous plaisait de me croire ; vous étiez charmante, notre lune de miel s’était levée et a duré ce qu’elle a pu durer. L’amour passé… il m’était resté pour vous une sorte de douce compassion… vous étiez bonne, soumise, résignée ; pour rien vous pleuriez, cela n’était pas gai… mais cela était attendrissant… et me touchait quelquefois si vivement que, lors des obsessions de Lugarto, j’ai tout risqué pour vous délivrer de cet… infidèle ami… Plus tard, lors de vos jalousies contre Ursule, l’état toujours intéressant dans lequel vous vous êtes trouvée, vos larmes, votre profond chagrin, votre amour qui ne faiblissait pas… tout cela m’a encore apitoyé… Vous l’avez vu,