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HISTOIRE DES CANADIENS-FRANÇAIS

Denis-Benjamin Viger, orateur, avocat, publiciste, homme politique, né à Montréal le 19 août 1774, a fourni une carrière active et utile, faisant honneur au nom canadien dont il était fier. Il étudia au collège Saint-Raphaël de Montréal et dès 1792 commença à répandre des essais de sa plume qui le firent remarquer. Élu par la ville de Montréal, en 1808, il arriva en Chambre avec son cousin, Louis-Joseph Papineau, tous deux armés contre les mesures arbitraires du gouverneur Craig. En 1809 il publia une brochure invoquant la conservation des mœurs, institutions, etc., des Canadiens-Français, dans l’intérêt de la Grande-Bretagne. On le menaça de la prison. Sa science et son patriotisme se révèlent par la lecture des journaux du temps, c’est-à-dire de 1800 à peu près jusqu’à 1836, époque où il collabora aux publications les plus en vogue et toujours dans nos intérêts nationaux. Délégué deux fois en Angleterre pour y conférer avec les ministres et obtenir des adoucissements au régime que l’on nous imposait, il remplit ces missions avec courage et dignité sans s’attirer le moindre reproche. Le 4 novembre 1838 il fut emprisonné et resta dix-neuf mois sous les verrous. Son rôle politique, en 1844, alors qu’étant premier ministre, il consentit à ce que le gouverneur nommât aux emplois, lui valut la perte de presque toute sa popularité, aussi eut-il la prudence de s’effacer, à un âge où il lui était bien permis de prendre du repos. Il n’en reste pas moins l’une des grandes figures de nos luttes politiques et l’un des hommes les plus respectés de nos compatriotes.

Les Debartzch sont originaires de Hambourg ; ils possédaient de grands biens, vers le milieu du dix-huitième siècle, mais les perdirent dans la révolution. Un fils de cette famille émigra en Canada et de son mariage avec une demoiselle Raimbault-Lussaudière laissa un enfant, Pierre-Dominique, qui hérita des seigneuries Delorme, Rougemont et Debartzch. En 1809 le comté de Chambly (Kent) l’élut, avec M. Louis-Joseph Papineau. Il servit comme capitaine en 1812-15, et se trouva à la bataille de Châteaugay. Nommé au conseil législatif (1815) il soutint la cause des Canadiens, combattit le projet d’union (1823) et prit une part active à tous les mouvements politiques de son temps. Il mourut en 1848.

La cause du clergé se trouva unie dans la politique de ce temps encore plus étroitement que de nos jours à tout ce qui intéressait notre nationalité. Disons un mot de Mgr Plessis et des grands-vicaires Noiseux et de Calonne.

Joseph-Octave Plessis était né à Montréal (3 mars 1763), d’une famille d’ouvriers. Après avoir commencé son instruction dans les classes de M. l’abbé Curateau, on l’envoya au petit séminaire de Québec (1778) ; il fut ordonné prêtre en 1786. Devenu curé de Québec, en 1792, ses talents attiraient sur lui l’attention publique, aussi ne fut-on pas surpris de le voir à trente-six ans (1797) devenir coadjuteur de Mgr Denaut. Celui-ci étant décédé, M. Plessis monta sur le trône épiscopal, le 27 janvier 1806, juste au moment où la lutte des patriotes contre l’oligarchie prenait un caractère alarmant. Tout d’abord il fit un acte politique adroit prêtant serment de fidélité au roi, devant le conseil exécutif, au grand déplaisir du parti anglais qui voulait au moins l’obliger à attendre l’arrivée du gouverneur, afin de gagner du temps ou de profiter de circonstances nouvelles pour susciter un obstacle sérieux entre l’évêque et le Pouvoir civil. Sa nomination déconcertait les plans de Ryland. Dès 1793, le duc