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PAPINEAU ET SON TEMPS

notre courage pour faire face à l’imprévu de ces moments terribles. Le tempérament de la race sauva ce petit peuple qui se transforma, se fit une éducation nouvelle, attendit l’occasion d’agir, profita des incidents favorables, s’émancipa à la longue du temps, bien mieux qu’il n’eût été capable de le faire sous le régime ancien.

Il se résolut à accepter sa situation et, à la manière des Normands ses ancêtres, il retourna le problème pour le résoudre. Alors cet enfant arraché à sa mère devint un homme ; cet exilé dans sa propre patrie se créa un patriotisme autochtone et devenant, comme le voulait le traité de 1763, sujet britannique, il en réclama les devoirs et les prérogatives.

Ainsi, en 1763, ruine partout. Le Canadien était dans la situation d’un homme qui voit réduire par le feu, en quelques heures, les biens qu’il possède. Aurait-il le courage de recommencer la lutte contre l’indigence ? Cette question resta en suspens pendant quelques mois. Elle devait un jour se trouver résolue par la forte trempe de la race. L’habitant tenait le sol : il comprit ce que cela valait.

La situation financière changea de formes avec les Anglais. Le numéraire à circulation libre prit sur le peuple un empire bienfaisant. Le commerce cessa d’être aux mains des coteries et des privilégiés. C’était un régime nouveau qui s’annonçait sous bonne couleur ; aussi la réflexion convainquit les Canadiens de la nécessité de le mettre à l’épreuve avant que de s’en plaindre. Ils avaient à leur portée les éléments d’une éducation tournée vers l’esprit public et favorisée par les institutions de leur nouvelle mère-patrie.