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Page:Surell - Étude sur les torrents des Hautes-Alpes, 1841.djvu/38

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étendue. Là, les eaux s’écoulent, sans affouiller leur canal, et sans l’exhausser[1].

On retrouve inévitablement ces trois régions dans toutes espèces de torrents, avec des formes variées, d’où résultent les actions variées des torrents. C’est à la présence constante de ces régions que ceux-ci doivent tout ce qu’il y a de général, et, en même temps, de funeste dans leurs propriétés. Examinons-les successivement.

La première région, que je nommerai Bassin de réception, a la forme d’un vaste entonnoir, diversement accidenté, et aboutissant à un goulot, placé dans le fond. — L’effet d’une pareille configuration est de porter rapidement sur un même point la masse d’eau, qui tombe sur une grande surface de terrain. Si l’on se rappelle la définition qui a été donnée des trois genres de torrents, on voit que cette distinction est fondée tout entière sur la position que leurs bassins de réception, occupent dans les montagnes. Ils affectent, à raison de cette position, des formes différentes.

Dans les torrents du premier genre, où les formes apparaissent sur l’échelle la plus large, le bassin de réception embrasse de vastes croupes de montagnes ; sa figure caractéristique se distingue même sur les cartes ordinaires[2]. Le goulot se prolonge vers l’aval, en formant une véritable vallée, ou plutôt, une gorge étroite, profondément encaissée par les flancs des montagnes, et dont la longueur est souvent de plus de deux lieues. Elle donne l’exemple, le plus parfait qui se puisse citer, de vallées ouvertes par l’unique action des eaux. — Dans cette gorge, les berges sont très-abruptes, minées par le pied, et déchirées par un grand nombre de ravins. Elles s’élèvent fréquemment à plus de 100 mètres au-dessus du lit. D’intervalle en intervalle, elles sont coupées par des torrents secondaires, qui se perdent, en se ramifiant, dans les contours de la montagne, et mènent dans la gorge les eaux d’une partie du bassin. Ces berges fournissent au torrent la plus grande masse de ses alluvions ; c’est de leurs flancs qu’il tire ces blocs énormes, qui tombent çà et là dans le lit, et sont ensuite portés au loin par les eaux[3].

  1. L’emplacement du pont de Sainte-Marthe, sur le torrent du même nom, peut être cité comme déterminant d’une manière très-précise le point de passage entre l’affouillement et l’exhaussement.
  2. Figure 15.
  3. Voyez la note 3.