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GRANDE PORTE DU PALAIS.

de la grande crevasse et qu’il les avait découverts à soixante mètres en arrière du point où travaillaient les ouvriers. Il nous servit de guide.

L’emplacement désigné fut attaqué, et bientôt apparut un énorme galet, cubant plus d’un mètre. À la partie supérieure une excavation, taillée au ciseau, recevait la crapaudine de métal où se mouvait le vantail. L’ensemble du monument reposait sur une fondation de gravier. À droite gisait l’urne d’albâtre qui contenait les textes commémoratifs. D’autres avant nous creusèrent sous la pierre un étroit chemin, violèrent ce vase et retirèrent les cylindres ou les sceaux gravés au nom du souverain qui ordonna l’érection de la porte. Mêlées aux terres, se trouvaient des feuilles de bronze repoussé, revêtement incontestable des huisseries de cèdre dont les fibres adhèrent encore aux clous.

Le dessin est simple, charmant, franchement déduit de l’emploi des matériaux.

Imaginez un blindage composé de plaques carrées, d’un pied de côté. Chaque carré est réuni à son voisin par trois listels de bronze creusant dans le vantail ces larges rainures si chères aux décorateurs assyriens et que l’on désigne sous le nom de refend. Le milieu de chaque plaque est orné d’une double marguerite, dont les contours sont repoussés au marteau.

Comme il fallait river ces lames de bronze et les relier aux ais, on les entoura d’une rangée de clous à tête ronde, puis on fixa des clous au sommet des pétales de la marguerite et au centre de l’ovaire.

Le fragment retrouvé forme un carré complet et présente tous les éléments de la décoration.

Crapaudine de grandeur colossale, débris de belles huisseries, double carrelage rencontré derrière la baie, inscription cunéiforme, linteaux et colonnes brisés, démontrent clairement que nous avons découvert l’emplacement de l’une de ces portes monumentales, orgueil des souverains de l’Orient. Cette porte mettait en communication médiate les demeures royales et la ville.

L’année dernière, malgré trois mois de pénibles efforts, nous ne parvînmes pas à déchirer les voiles des grandes entrées du palais : aujourd’hui une baie s’abandonne sans fausse honte ni coquetterie. Les vieux édifices auraient-ils une âme de femme ?

Le style des émaux et des ornements, les caractères de l’épigraphe, la crapaudine géante scellée au niveau du palais d’Artaxerxès, indiquent que le monument, comme l’apadâna, appartient à la période achéménide.

25 décembre. — O patria ! O Divum domus Ilium !

L’homme transporte en tous lieux une patrie idéale, composée de ce qu’il a vu et aimé, et il s’y blottit sans cesse, alors même qu’il parcourt et semble habiter un monde étranger.