Page:Swift - Gulliver, traduction Desfontaines, 1832.djvu/320

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attentivement. Mais le bidet alezan m’aida beaucoup.

Il faut avouer que la prononciation de cette langue me parut très-difficile. Les Houyhnhnms parlent en même temps du nez et de la gorge ; et leur langue, également nasale et gutturale, approche beaucoup de celle des Allemands, mais est beaucoup plus gracieuse et plus expressive. L’empereur Charles-Quint avait fait cette curieuse observation ; aussi disait-il que s’il avait à parler à son cheval, il lui parlerait allemand.

Mon maître avait tant d’impatience de me voir parler sa langue pour pouvoir s’entretenir avec moi et satisfaire sa curiosité, qu’il employait toutes ses heures de loisir à me donner des leçons et à m’apprendre tous les termes, tous les tours et toutes les finesses de cette langue. Il était convaincu, comme il me l’a avoué depuis, que j’étais un yahou ; mais ma propreté, ma politesse, ma docilité, ma disposition à apprendre, l’étonnaient : il ne pouvait allier ces qualités avec celles d’un yahou, animal grossier, malpropre et indocile. Mes habits lui causaient aussi beaucoup d’embarras, s’imaginant qu’ils étaient une partie de mon corps ; car je ne me déshabillais, le soir, pour me coucher, que lorsque toute la maison était endormie, et je me levais le matin et m’ha-