Page:Swift - Gulliver, traduction Desfontaines, 1832.djvu/80

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ces peuples sont tombés dans un grand excès de corruption : témoin cet usage honteux d’obtenir les grandes charges en dansant sur la corde, et les marques de distinction en sautant par-dessus un bâton. Le lecteur doit observer que cet indigne usage fut introduit par le père de l’empereur régnant.

L’ingratitude est parmi ces peuples un crime énorme, comme nous apprenons dans l’histoire qu’il l’a été autrefois aux yeux de quelques nations vertueuses. Celui, disent les Lilliputiens, qui rend de mauvais offices à son bienfaiteur même doit être nécessairement l’ennemi de tous les autres hommes.

Les Lilliputiens jugent que le père et la mère ne doivent point être chargés de l’éducation de leurs propres enfans ; et il y a dans chaque ville des séminaires publics, où tous les pères et les mères, excepté les paysans et les ouvriers, sont obligés d’envoyer leurs enfans de l’un et l’autre sexe pour être élevés et formés. Quand ils sont parvenus à l’âge de vingt lunes, on les suppose dociles et capables d’apprendre. Les écoles sont de différentes espèces, suivant la différence du rang et du sexe. Des maîtres habiles forment les enfans pour un état de vie conforme à leur naissance, à leurs propres talens et à leurs inclinations.