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LE CONTE

hommes, dont les travaux infatigables ont découvert les endroits foibles des Anciens, & nous en ont donné un Catalogue copieux. Ce ſont eux, qui ont demontré, que les plus belles choſes, qui nous ſont communiquées par l’Antiquité, ont été inventées & miſes en lumiere par des plumes beaucoup plus recentes ; & que les plus grandes découvertes, qu’on lui attribuë par raport à la Nature & aux Sciences, avoient déja été trouvées par le Genie tranſcendant de nos contemporains : ce qui montre évidemment, combien le merite des Anciens eſt mince, & doit mettre des bornes à cette admiration aveugle dont ils ſont honorez par des gens enſevelis dans la pouſſiere du Cabinet, & aſſez malheureux pour ignorer ce qui ſe paſſe à préſent dans le Monde.

En déliberant meurement ſur toutes ces choſes, & ſur les proprietez eſſentielles de l’eſprit humain, je n’ai pû m’empêcher d’en conclure, que les Anciens, perſuadez fortement de leurs nombreuſes imperfections, doivent s’être efforcez dans quelques paſſages de leurs livres, à l’imitation de leurs Maîtres les Modernes, à détourner ou à adoucir