Page:Sybel - Histoire de l’Europe pendant la Révolution française 2.djvu/202

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

198 DEUXIÈME PARTAGE DE LA POLOGNE.

aurait quarante pour 2000 ducats (1). Sans doute, l’égoïsme et l’avidité des masses étaient appuyés ici par des considérations politiques. Beaucoup ne se montraient favorables à la Russie que par haine contre les Targowiciens, dont les Russes leur promettaient la chute. D’autres, non moins nombreux, étaient mus par la pensée que, depuis cent ans déjà, ils étaient de fait sujets de la Russie, que la résistance ne ferait qu’empirer leur situation, et que ce serait pure folie que de ne pas se laisser payer pour reconnaître et admettre ce que l’on ne pourrait refuser à la violence. Enfin, les sentiments du roi Stanislas et de Kossakowski s’étaient communiqués de toutes parts au pays; c’est-à-dire une vive répulsion contre tout ce qui était allemand, répulsion rendue plus profonde encore par la situation prospère des colons allemands de la Grande-Pologne, par leur protestantisme, par leur supériorité incontestable et leurs sentiments patriotiques. Avec quelle humiliation et quelle colère ne voyait-on pas plus d’un propriétaire s’enquérir hautement des limites encore inconnues des provinces qui allaient devenir prussiennes, afin d’acheter des terres dans ces provinces avant que le changement de domination en eût fait monter les prix (2) ? Dans ces dispositions, on était prêt à faire cent pas au-devant des Russes, afin de s’attirer leur protection, ne fût-ce que pour faire reculer les Prussiens d’un pouce I L’honnête Buchholz était loin de penser que Sievers fût en cela d’accord avec les Polonais. Quelques fragments de leurs lettres à tous deux peindront mieux la situation que ne pourraient le faire toutes les explications.

9: Le roi, écrivait Buchholz le 2 mars, m’annonce que le ministre de Hoym doit m’envoyer la forte somme que j’ai demandée, Cette nouvelle a fait un grand plaisir à l’ambassadeur il est certain que nous nous entendons à merveille, – Nous poursuivons notre chemin de gré ou de force, disait-il deux mois plus tard; nous avons fait, de l’argent qui nous a été donné, une caisse commune, qui sert efficacement les besoins de la cause. «  De son côté, Sievers écrivait à son ministère au commencement d’avril « Vous m’avez donné, dans mes instructions, la mission d’empêcher autant que possible l’agrandissement de la fl) Blum, Mémoires sur le comte Sievers, III, 232, 623.

f2) Buchholz aMtBilendorf, 2 avril.