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Page:Sybel - Histoire de l’Europe pendant la Révolution française 2.djvu/307

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CttOTË M LA (MROUDË. 303

gnance mal dissimulée, mais enfin elle se soumit. Des masses considérables se rassemblèrent, plus considérables souvent que ne l’exigeait la loi; dans quelques départements, elles s’élevèrent jusqu’à vingt et trente mille hommes. Le Comité de Salut public ne négligea rien pour transformer ces essaims de recrues en troupes régulières et utiles; la fabrication des armes reçut une impulsion nouvelle, tous les chevaux de luxe furent mis en réquisition, on confectionna des habits et des souliers jusqu’à épuiser le trésor. Ces recrues étaient envoyées dans des dépôts établis dans toutes les places convenables de l’intérieur, où elles recevaient une première éducation militaire avant d’être dirigées sur les diSerentes armées. Nous pouvons déclarer dés à présent que ce furent ces mesures actives de Danton et du premier Comité de Salut public, jointes aux dissensionsqui divisaient la coalition, qui donnèrent à la République le pouvoir de résister à l’Europ En l’espace de deux mois les armées Françaises atteignirent un d~gré de force auquel elles se maintinrent pendant toute l’année; ce ne fut qu’en 179& que l’administration de Carnot les augmenta encore. L’assertion si souvent répétée que la chute dela Gironde et la souveraineté de la Montagne ont fait surgir tout à coup quatorze armées, n’est donc qu’une de ces nombreuses phrases vides de sens dont est remplie l’histoire de cette époque. Nous verrons bientôt, au contraire, que toutes les mesures propres au parti de la Montagne, loin d’accélérer les armements, les ont entravés. On peut dire avec certitude que la France a été victorieuse, non par les Jacobins, mais malgré eux.

La conduite des commissaires de la Convention pendant ce premier recrutement confirme pleinement ce que nous avançons. Nul n’aurait pu les blâmer s’ils s’étaient bornés à procéder avec une sévérité souvent impitoyable, sans se laisser toucher par aucun intérêt privé, ou à exiger, lors des réquisitions, plutôt plus que moins que ce qui était nécessaire à l’armée mais partout les armements ne furent qu’un prétexte dont ils se servaient pour soumettre le pays à la souveraineté de la populace et des clubs. Un coup d’œil jeté sur leur conduite nous montrera immédiatement vers quel abîme ils poussaient la France. Leur premier soin était partout de destituer les fonctionnaires qui leur déplaisaient, d’instituer dans chaque département un