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806 SUSPENSION DE LA GUERRE DE LA COALITION.

égoïstes (1). Au mois de mars, toutes les prisons de la ville étaient pleines cependant les massacres furent encore ajournés, par suite d’un désaccord qui s’établit entre le rigoureux Jacobin Challier et les commissaires Legendre et Bazire, adorateurs exclusifs de Danton. Cela seul empêcha l’érection du tribunal révolutionnaire (2). A Marseille, au contraire, l’entente était parfaite les commissaires ordonnèrent dans cette ville le désarmement général des citoyens récalcitrants, et se mirent en devoir de former, au moyen des armes ainsi acquises, une troupe patriotique de six mille hommes qui devait marclier sur Paris et provoquer un 10 août pour la Gironde (3).

A la fin d’avril, tous les départements, à l’exception de la Vendée et des villes de Rouen et do Bordeaux, étaient donc à peu près soumis à la domination de la populace et des Jacobins. Ce fait ne pouvait manquer de réagir fortement sur le centre du pays, c’est-à-dire sur Paris et sur la Convention. L’effet moral seul en était dr’ja puissant les vainqueurs ne dissimulaient plus leur désir de diriger des provinces conquises sur Paris des instruments matériels destinés à soutenir la lutte (A). La Gironde, qui se voyait menacée la première, réfléchit sur sa position et résolut de prévenir l’attaque. L’absence des commissaires rendait le moment favorable a la Convention, car cette absence enlevait à la Montagne plus de cent de ses voix les plus déterminées. On pouvait en outre, par suite même des abus de la tyrannie démocratique, compter dans le pays sur le désespoir et le mécontentement des classes moyennes. Jusqu’alors, celles-ci avaient détesté les Girondins à l’égal des Jacobins, car elles voyaient en eux les auteurs de la guerre et les destructeurs de la Constitution. Mais il ne s’agissait plus de la forme du gouvernement ni d’intérêts politiques quelconques il s’agissait de la vie, des droits, des propriétés, de la morale, de la sécurité de tous, et la Gironde était (1) Guillon de Monléon, Lyon, 1~ 158. A~’o~H~o~ Je Pa;’M, XV, 234, 402, 433. Extraits de la Ga=<?Me de Lyon (Gorsas), 27 février. (2) Ceci est avéré par les pièces produites par GuiHon mais l’enchaînement de ces faits avec des menées bourbonistes (Funke, 1793) ou orléanistes que Guillon accepte, en enchérissant encore plus vaguement sur les données déjà si vagues de Sénart, n’est qu’une invention. ·

(3) Rapport de la police, du 26 avril (Archives impériales). Desficux aux Jacobins, 17 avril, C. N., 12 et 25 mai.

(A) Rapports de Bordeaux, C. N., 18 avril, de N!mes, C. N., 7 mai.