Page:Sybel - Histoire de l’Europe pendant la Révolution française 2.djvu/336

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

332 SUSPENSION DE LA GUERRE DE LA COALITION.

pais l’effet qu’en attendaient ses auteurs, ceux-ci devaient encore être soumis à Paris à des fluctuations pleines de dangers inattendus. Ils s’étaient si exclusivementpréoccupés dans leur travail des opinions libéralesdela masse delapopulation, qu’ils avaient perdu de vue pour un moment les exigences de leurs fidèles amis les prolétaires, et qu’ils furent péniblement surpris en voyant la stupéfaction d’abord, puis le courroux de ces derniers. La populace avait si souvent repu de ses chefs des promesses de marchandises a bas prix et de salaire assuré, elle était, depuis le 2 juin, tellement sûre du triomphe de sa cause, qu’elle ne pouvait en aucune façon s’expliquer une semblable et si complète désillusion. Quelques agents infimes de l’Hôtel de Ville, tels qu’un certain Leclerc, de Lyon, le prêtre Roux, l’orateur populaire Varlet, qui ne se trouvaient pas suffisamment récompensés de ce qu’ils avaient fait jusque-là et qui pensaient valoir tout autant qu’Hébert et Robespierre, attisèrent le feu, gagnèrent le club des Cordeliers et quelques sections, et parurent le 25 juin ;’) la barre de la Convention, pour reprocher à la Montagne de les avoir trahis et pour demander que la constitution contînt une loi contre l’usure et contre les accapareurs (1). La Montagne, peu disposée à se laisser dépasser dans les bonnes grâces du peuple par ces hommes nouveaux, ou à se laisser démasquer avant le temps aux yeux de la classe moyenne, les renvoya avec d&dain et mépris, et le 26, la Commune, sur la proposition d’Hébert, passa à l’ordre du jour sur leur pétition, qu’elle qualifia de dangereuse pour l’État. Alors le peuple, se souvenant du 25 février et des principes qu’Hébert avait alors professés, pilla pendant deux jours tous les bateaux amarrés le long des quais et les boutiques des rues voisines. Malgré toute leur colère, les hommes qui étaient alors au pouvoir n’osèrent faire marcher la garde nationale contre leurs anciens amis; ils se contentèrent de ramener le club des Cordeliers à leurs idées de prudence par l’influence des Jacobins, et d’enlever par là aux nouveaux (1) Les discussions de la Convention, de la Commune et des Cordeliers ne laissent aucun doute sur le caractère de ce mouvement. On comprend que Robespierre et Hébert aient trouvé bon de désigner les émeutiers comme une nouvelle fraction des « enragés » mais, ce que l’on consoit moins, c’est que des écrivains modernes aient cherche sérieusement quels étaient les principes et le programme de ce,parti.