Aller au contenu

Page:Sybel - Histoire de l’Europe pendant la Révolution française 2.djvu/381

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

RUPTURE DE LA COALITION. 377

afin de rassurer Charles-Théodore sur lesintentions deFAutriche. Le vieil électeur, qui n’avait jamais aimé la Bavière, aurait volontiers consenti à l’abandonner à l’empereur moyennant une juste compensation; mais il était arrêté par l’opposition de ses cousins de Deux-Ponts, par un puissant parti qui s’était formé à la cour même de Munich, et enfin par les objections de la diplomatie anglaise. Thugut chargea donc Lehrbach de lui assurer que le projet d’échange était abandonné pour le moment, et qu’en tous cas l’empereur ne déciderait rien dans cette question sans l’en informer, toujours sous la réserve, dit en même temps Thugut à l’ambassadeur d’Angleterre à Vienne, que ce projet pourrait encore être employé contre la Prusse comme ruse diplomatique. L’électeur fut pleinement rassuré par cette communication. Aussitôt après le départ de Lehrbach, il convoqua la diète bavaroise et lui déclara formellement qu’il ne songeait à échanger la Bavière contre n’importe quel pays les États exprimèrent avec enthousiasme leur approbation, et, outre le contingent dû à l’empire contre la France, ils votèrent une somme de 17 000 florins, destinée à assurer la défense du pays contre toute invasion hostile.

C’est dans ces circonstances que Lehrbach arriva le 25 août au quartier général des Prussiens. C’était un homme grand et maigre, au regard*percant et aux mouvements brusques, connu pour être un négociateur rusé et habile, très-versé dans la connaissance des affaires de l’empire et ennemi déclaré de la Prusse. Conformément à son mandat, son premier mot fut pour la Bavière, et il ajouta que, s’il ne pouvait réussir de ce côté, l’empereur se verrait forcé de réclamer le secours de la Prusse pour s’emparer de l’Alsace et de la Lorraine. Lucchesini, qui était chargé de cette négociation, lui demanda si l’Angleterre ne s’opposait pas formellement à l’échange bavarois (il avait reçu à ce sujet un avis un peu vague mais très-fondé, comme nous le savons, de lord Yarmouth, le représentant de l’Angleterre au quartier général), sur quoi Lehrbach répondit sans hésiter que rien n’était plus faux et répéta de la manière la plus expresse que l’empereur ne renoncerait jamais à ses projets. Lucchesini promit d’en référer au roi; mais ’auparavant il alla trouver lord Yarmouth, afin de savoir, s’il était possible, toute la vérité.