Aller au contenu

Page:Sybel - Histoire de l’Europe pendant la Révolution française 2.djvu/62

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

M COMMENCEMENT DE LA GUERRE ANGLO-FRANÇAISE.

Révolution à poursuivre les peuples de sa haine, comme jusquelà elle avait poursuivi les rois, et les rêves de liberté des Girondins avaient fait place au système de pillage de Danton. Les gouvernants français trouvèrent un dédommagement au renversement de leurs plans dans ce fait que leur avidité n’était plus arrêtée par les théories d’alliance fraternelle entre les nations qu’ils avaient prêchées jusque-là. « Si les peuples, dans leur aveuglement, s’offensent de voir châtier un despote, disaient-ils, tant mieux pour la Révolution, qui, avec le nombre de ses ennemis, verra augmenter non les dangers, mais la gloire et le butin. S’ils repoussent la main fraternelle de la République, ils sentiront le poids de la colère de la liberté, et tout ce qu’ils possèdent servira à apaiser la soif du vainqueur. )) Ils avaient plusieurs raisons d’ailleurs pour ne pas être mécontents de la nouvelle tournure que prenaient les choses. Le mois de novembre avait présenté, en regard de 28 millions de recettes, 138 millions de dépenses, sur lesquels ta guerre seule en avait dévoré 122 1 Clavière regardaitdonccomme impossible de conserverplus longtemps, dans les pays conquis, le masque d’une fraternité désintéressée, et Cambon disait ouvertement aux patriotes belges que la France, qui avait besoin des biens de leur Église pour couvrir ses assignats, ferait de la Belgique une province française. On renoncait aux horizons sans bornes assignés jusque-là à la propagande, afin de poursuivre des conquêtes plus sûres dans un cercle plus restreint.

Les nouvelles tendances reçurent immédiatement leur application officielle. Le 15 décembre, deux jours après l’ouverture du Parlement anglais et la décision du Conseil des ministres relativement aux quartiers d’hiver de l’armée française, Cambon proposa à la Convention de soumettre à la domination des sansculottes les pays voisins, qu’on avait appelés jusqu’alors à la liberté’et au choix de leurs destinées, et de leur faire supporter le fardeau des assignats. a Destruction des palais et paix aux chaumières, tel est, dit-il, le but de la guerre. Jusqu’ici, nos troupes ont chassé les tyrans, mais elles ont laissé subsister les privilèges; si un peuple veut mériter tout à la fois et la liberté et notre amitié, il faut qu’il fasse ce que nous avons fait, qu’il détruise les priviléges et qu’il laisse les sans-culottes prendre