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PROCÈS DE LOUIS XVI. 73

cembre et à redoubler d’ardeur révolutionnaire, ce changement produisit chez les Girondins un retour complet vers leurs anciennes tendances, et les ramena à une politique sincèrement pacifique. Ils virent qu’il fallait, avant tout, opérer une guérison radicale à l’intérieur, et ils résolurent de mettre fin, par une grave mesure, aux troubles et aux excès démocratiques. Une vingtaine des Girondins les plus importants se réunissaient alors chaque soir dans la demeure de Valazé, sous la direction de Buzot, de Salle et de Grangeneuve, afin d’étudier les questions qui devaient être discutées le lendemain (1). Ils délibérèrent longuement sur le sort du roi, et, comprenant qu’après tout ce qui s’était passé il leur était impossible de proposer ouvertement l’acquittement, ils cherchèrent un moyen a l’aide duquel on pût, sinon arriver à une délivrance immédiate, du moins gagner du temps. Ils se rappelèrent alors qu’au commencement du procès, Danton avait parlé d’un appel final à la nation ils savaient que Lepelletier à la gauche et Barrère au centre s’y étaient montrés favorables. Ils se rattachèrent donc avec ardeur à une pensée qui leur paraissait excellente à tous égards, car ils apprenaient de toutes parts combien les départements témoignaient de répulsion pour le parti de septembre. Les villes envoyaient sans cesse des fédérés pour protéger la Convention les clubs de province eux-mêmes adressaient aux Jacobins de Paris des adresses dans lesquelles ils exprimaient la méfiance que leur inspirait Marat. Les Girondins ne doutaient pas que les assemblées primaires, dans quelque but qu’elles fussent réunies, ne pussent être facilement amenées à exprimer énergiquement la volonté du peuple contre les Jacobins. Après avoir bien pesé toutes ces considérations, ils se réjouirent presque de ce que le procès du roi leur donnât l’occasion de recourir à une mesure aussi salutaire, et ils résolurent de demander que la Convention prononçât le jugement du roi, mais en soumettant ensuite ce jugement à la sanction des assemblées primaires.

Il était facile de prévoir que ce plan ne réussirait pas. Qui-

(1) Lettres de Valazé à ses commettants (Archives impériales, papiers du Comité de Salut public).