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Page:T. Corneille - Poèmes dramatiques, tome 1, 1748.djvu/344

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Cliton

Jamais d’un autre Amant elle ne fit de cas ?
Dites encor, Monsieur, que vous n’enragez pas.

Oronte

À quel sujet ?

Cliton

Pourquoi déguiser de la sorte ?
Vous enragez, vous dis-je, ou le Diable m’emporte.
Verriez-vous sans dépit deux Amours à vau-l’eau ?

Oronte

Leur perte à mon humeur offre un jeu tout nouveau,
Et dès que je verrai Dorotée ou Lucie…

Cliton

Quoi, vous leur parlerez ?

Oronte

Oui, j’en brûle d’envie.
C’est là que je prétends étaler à leurs yeux
Ce que l’art de se plaindre a de plus curieux,
Les soupirs seuls alors auront pour moi des charmes,
S’ils font trop peu d’effet, j’aurai recours aux larmes,
Mille sanglots confus feront mon entretien,
Mais j’aurai beau gémir, mon cœur n’en saura rien,
Et feignant qu’en la mort j’espère un prompt remède,
Je verrai sans douleur qu’un autre les possède.

Cliton

Pour vous voir à toute heure on ne vous connoît pas.

Oronte

Un peu de patience, et tu me connoîtras.
Cependant ce quartier ne m’est pas si funeste
Que je n’y sache encor où jouer de mon reste.

Cliton

Et vous pensez trouver qui vous écoutera ?

Oronte

Oui, Cliton, avec joie, et quand il me plaira.
Certaine Brune hier trouvée aux Tuileries
Servit longtemps d’objet à mes galanteries ;
Nous fîmes connoissance, où je fus assez sot
D’offrir un diamant dont on me prit au mot,