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Page:T. Corneille - Poèmes dramatiques, tome 1, 1748.djvu/368

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Que par là son mérite est en son plus beau jour,
Et que ma passion ennoblit ton amour ?

Cliton

C’est ce que j’appréhende, et que par votre adresse,
Vous ne m’alliez donner des lettres de Noblesse.
J’ai peu d’ambition, Monsieur, et franchement
Je me passerois bien de l’ennoblissement.

Oronte

C’est fort mal reconnoître une faveur si grande.

Cliton

Vous m’en faites cent fois plus que je n’en demande.

Oronte

Va, ne te fâche point, avant qu’il soit huit jours
Je pourrai te laisser paisible en tes amours ;
Ce temps en ma faveur fera bien des miracles,
Et de ma part alors tu n’auras plus d’obstacles.

Cliton

Oui, mais pour m’obliger, jusques à ce beau jour
Vous me ferez l’honneur d’ennoblir mon amour ?
Je vous devrai beaucoup.

Oronte

Plus que tu ne peux croire.

Cliton

Vos générosités vous mettront dans l’Histoire.

Oronte

Cliton, sans la flatter, Lisette a des appas
Dont, quelque effort qu’on fasse, on ne se défend pas ;
À toute autre Beauté mon amour la préfère,
Et comme elle me plaît autant qu’elle peut faire,
Crois que c’est en user modestement
Que de te l’emprunter pour huit jours seulement.

Cliton

Puisque vous y trouvez de si grands avantages,
Prenez-la pour toujours, et redoublez mes gages ;
Aussi bien d’aujourd’hui j’en suis fort dégoûté.
Vous avez à tel point enflé sa vanité,
Que par mépris, la Gueuse oubliant sa promesse,
Ne m’a point averti du nom de sa Maîtresse.