Page:T. Corneille - Poèmes dramatiques, tome 1, 1748.djvu/411

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Dorotée

Ton zèle me ravit.

Lisette

Je pétillois de rage.
Moi, vous trahir ! Vous vendre ! Ô qu’il s’adressoit bien !
Il auroit pu m’offrir…

Dorotée

Va, tu n’y perdras rien.
Admire cependant aux termes où nous sommes
Combien j’avois raison de haïr tous les hommes,
Puisque Oronte, en faveur de qui ce triste cœur
Relâchoit un orgueil qui fait tout mon bonheur.
Cet Oronte me fourbe, il me joue, il me brave,
Et pris en d’autres fers, feint d’être mon esclave.
Mais qu’à propos sa feinte a su se découvrir !
Avec ce lâche Amant j’étois prête à m’ouvrir,
À prendre son avis pour rompre un Hyménée…

Lisette

Vous l’espérez en vain, la parole est donnée.
Votre Père vous presse, et pourra tout sur vous.

Dorotée

Il a beau me presser, malgré ces rudes coups…

Lisette

Mais Florame lui plaît, il le souhaite, il l’aime.

Dorotée

Florame en un besoin m’y servira lui-même.
Pour rechercher jamais cette triste union,
Il est trop averti de mon aversion.
En vain de nos Vieillards l’impuissante manie
Veut sur nos volontés user de tyrannie,
Dans toutes nos froideurs l’un et l’autre d’accord,
De leur autorité nous craignons peu l’effort.
Mais qui ferme la porte, et que prétend-on faire ?