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Page:T. Corneille - Poèmes dramatiques, tome 3, 1748.djvu/61

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BÉATRIX.

Doutez, puisqu’il vous plaît, pour moi, je suis pour eux ;
Et j’ai vû tant de fois de telles ressemblances,
Que je ne puis avoir toutes vos défiances.
Pour s’être tenu prêt à fourber avec nous,
Pouvoit-il deviner qu’on le menoit chez vous ?
Y seroit-il venu, sachant ce qu’il hazarde ?
Outre que, si vous-même y voulez prendre garde,
Quel que soit leur rapport de visage & de voix,
L’autre sembloit moins large, & plus grand de deux doigts.

D. JUAN.

Oui, je lui croi la taille un peu plus déchargée.

D. FERNAND.

Non, non, c’est entre nous une histoire forgée,
Madame en juge mieux, & me doit quereller,
De peur que mon malheur ne m’oblige à parler.

ISABELLE.

Quels reproches de vous aurois-je lieu de craindre ?

D. FERNAND.

Celui de mal aimer, ou plûtôt de trop feindre ;
Et de m’avoir caché qu’un plus heureux que moi
Était maître du cœur où prétendoit ma foi.

ISABELLE.

Si quelque autre a sur lui la victoire obtenue,
Je pourrois opposer l’amour d’une inconnue ;
Mais quoi que vous fassiez j’y prends peu d’intérêt.

D. FERNAND.

Pour l’inconnue enfin je ne sais ce que c’est ;
Une telle aventure en vain pour moi s’explique,
Je n’y prens point de part, mais…

GUZMAN.

Je n’y prens point de part, mais…Elle est hérétique,
Monsieur, vous perdez temps.

BÉATRIX.

Monsieur, vous perdez temps.Quel seroit son dessein,
Madame, pensez-vous…