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Page:T. Corneille - Poèmes dramatiques, tome 3, 1748.djvu/64

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GUZMAN.

Mais croyez-vous chez lui comme gendre paroître,
Sans que soudain ailleurs il vous fasse connoître ?
Si jusqu’à l’inconnue on fait courir ce bruit,
Au choix de Léonor vous vous verrez réduit.
Isabelle de vous déjà se désabuse.

D. FERNAND.

Il faut pour le beau-pere inventer quelque ruse,
Et la mener si bien, qu’après mon compliment
Il me permette encor huit jours d’éloignement.
Je puis chez Dom Juan d’une affaire secrette
Pour un terme si court prétexter ma retraite,
Presser mon aventure, & pénétrer enfin
Quel succès de mes feux doit régler mon destin.

GUZMAN.

Ce sont feux volatils dont je crains bien l’issue.
Deux beautés, à la fois, vous ont frappé la vûe ;
Et, quittant Léonor sur l’appas d’un faux bien,
Vous risquerez à tout, & n’attraperez rien

D. FERNAND.

Voyons-la, puisqu’au pere il faut rendre visite,
Entrons. Mais, Dieux ! Guzman, que j’ai l’ame interdite !

GUZMAN.

Qu’avez-vous ?

D. FERNAND.

Qu’avez-vous ?Qui jamais vit un feu plus constant ?
Dans la cour de Dom Diégue on m’épie, on m’attend ;
J’y vois mon inconnue avecque sa suivante.

GUZMAN.

N’en doutez point, Monsieur, la chose est évidente.
Elle a sû votre hymen ; &, voulant l’empêcher,
Ici chez le beau-pere elle vient vous chercher.
Voilà comme un secret ne se peut jamais taire.