Page:T. Corneille - Poèmes dramatiques, tome 4, 1748.djvu/258

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Mais enfin il falloit, si vous me vouliez plaire,
Ne m’en venir rien dire, et mourir pour mon Père.
J’aurois suivi ses pas, et c’est de quoi rougir
De plaindre son malheur quand je devrois agir.
Mais en vain je déploie, et promesse et prière,
Dans cet appartement on me tient prisonnière,
Mes efforts pour sortir ont été superflus,
On m’arrête, et peut-être Annibal ne vit plus.

Prusias

Si le Ciel aujourd’hui me met dans l’impuissance
D’empêcher une injuste et lâche violence,
Au moins, Madame, au moins de cette trahison,
Il ne tiendra qu’à vous que vous n’ayez raison.
Venez dans mes États, et toute à votre haine
Accepter mon secours avec le nom de Reine.
Pour venger Annibal il n’est rien qu’avec vous
Contre ses Assassins ne tente mon courroux,
Rien qu’à son sang versé ma passion s’immole.

Élise

C’est donc là comme un Roi lui doit tenir parole ?
Vous voyez qu’on l’attaque, et fuyant le danger
Vous le laissez périr afin de le venger ?
Ah, c’est m’en dire trop ; vous l’avez livré, traître,
Ce nom de Reine offert me le fait trop connoître.
Ah, si le Prince au moins… mais de quoi me flatter ?
Vos lâches partisans l’auront fait arrêter,
Il ne peut rien pour nous, et tout nous abandonne.

Prusias

Quoi, du crime d’Attale il faut qu’on me soupçonne ?
Et quand ouvertement on voit que le Romain
Pour prix de son forfait lui donne votre main,
Cet Attale…

Élise

Du moins il fait ce qu’il doit faire.
Il anime les siens à défendre mon père,
Se donne pour exemple et les enhardissant…
PRUSIAS montrant Attale.
Voyez si c’est pour eux un exemple pressant.