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Page:T. Corneille - Poèmes dramatiques, tome 4, 1748.djvu/574

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Il se trouble, il s’emporte, et dès que je vous vois,
Ma tremblante vertu ne répond plus de moi.

THESEE.

Ah, puisqu’en ma faveur l’Amour fait ce miracle,
Oubliez qu’une Soeur y voudra mettre obstacle.
Pourquoi pour l’épargner trahir un si beau feu ?

PHÈDRE.

Mais sur quoi vous flattez d’obtenir son aveu ?
Sachant que vous m’aimez…

THESEE.

C’est ce qu’il faut lui taire.
Sa fuite de Minos allume la colère,
Pour s’en mettre à couvert elle a besoin d’appui ;
Le Roi l’aime, faisons qu’elle s’attache à lui,
Et qu’acceptant sa main au défaut de la mienne,
Elle souffre en ces lieux qu’un Trône la soutienne.
Quand un nouvel amour par l’hymen établi
M’aura par l’habitude attiré son oubli,
Qu’elle verra pour moi son mépris nécessaire,
Nous pourrons de nos feux découvrir le mystère.
Mais prêt à la porter à ce grand changement,
J’ai besoin de vous voir enhardir son Amant,
De voir que dans vos yeux, quand ce projet me flatte,
En faveur de l’Amour un peu de joie éclate ;
Que contre vos frayeurs rassurant votre esprit,
Elle efface…

PHÈDRE.

Allez, Prince, on vous aime, il suffit.
Peut-être que sur moi la crainte a trop d’empire.
Suivez ce qu’en secret votre cœur vous inspire ;
Et de quoi que le mien puisse encor s’allumer,
N’écoutez que l’Amour, si vous savez aimer.