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Page:T. Corneille - Poèmes dramatiques, tome 4, 1748.djvu/575

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ACTE II



Scène I


Ariane, Nérine.

NÉRINE.

Le Roi, de ce refus eût eu lieu de se plaindre,
Madame, vous devez un moment vous contraindre ;
Et quoiqu’en l’écoutant vous ne puissiez douter
Que c’est son amour seul qu’il vous faut écouter,
Votre hymen dont enfin l’heureux moment s’avance,
Semble vous obliger à cette complaisance.
Il vous perd, et la plainte a de quoi soulager.

ARIANE.

Je sais qu’avec le Roi j’ai tout à ménager,
J’aurois tout de l’aigrir. L’asile qu’il nous prête
Contre la violence assure ma retraite.
D’ailleurs, tant de respect accompagne ses voeux,
Que souvent j’ai regret qu’il ne puisse être heureux.
Mais quand d’un premier feu l’âme toute occupée
Ne trouve de douceur qu’aux traits qui l’ont frappée,
C’est un sujet d’ennui qui ne peut s’exprimer,
Qu’un Amant qu’on néglige, et qui parle d’aimer.
Pour m’en rendre la peine à souffrir plus aisée,
Tandis que le Roi vient, parle-moi de Thésée.
Peins-moi bien quel honneur je reçois de sa foi,
Peins-moi bien tout l’amour dont il brûle pour moi ;
Offres-en à mes yeux la plus sensible image.

NÉRINE.

Je crois que de son cœur vous avez tout l’hommage ;
Mais au point que de lui je vois vos sens charmés,
C’est beaucoup s’il vous aime autant que vous l’aimez.